On entend parfois parler du zèle religieux de façon péjorative ou ironique comme synonyme de prosélytisme. Dans un monde sécularisé, l’exemple de personnes zélées dans l’annonce de l’Évangile peut sembler relever, même au regard des croyants, d’une sorte d’exagération, voire d’intégrisme.
Pourtant, selon saint Thomas d’Aquin, loin d’être un simple supplément dans la vie de foi, le zèle apostolique tient une place de choix entre les vertus chrétiennes. Il y aurait donc un bon zèle, donné par Dieu. Quelques réflexions peuvent peut-être aider dans ce discernement et nous réconcilier avec ce qui se manifeste par une ardeur à vivre sa foi et à la communiquer aux autres. Au final, on peut se demander dans quelle mesure nous-mêmes avons du zèle pour l’Évangile.
Une passion
Tout d’abord, pour nous éclairer, nous trouvons dans le Christ l’exemple parfait du zèle pour Dieu et ses desseins. Lors de l’épisode des vendeurs chassés du Temple dans l’Évangile selon saint Jean (cf. Jn 2), il est écrit que les disciples se souviennent du verset de la Parole : « Le zèle de ta maison me dévore » (Ps 69, 9). Jésus était consumé par l’amour du Père. Il était tout entier consacré à sa mission. Il ne craignait pas l’adversité. Même jusqu’à la mort, il ne s’est pas détourné de son appel, son seul but étant d’accomplir la volonté de son Père. Ainsi, celui qui a du zèle pour Dieu lui donne toute sa vie et tout son cœur en sacrifice vivant et ne retient rien pour lui-même et ses projets personnels.
Le prophète Élie est, quant à lui, rempli d’un zèle jaloux pour le Seigneur (cf. 1R 19, 10). En hébreu, cette jalousie traduit l’élan qui pousse à se rapprocher de Dieu. Le zèle est donc d’abord passion pour Dieu, désir qui nous pousse à faire l’expérience de son Amour et nous transforme en témoin authentique de cet amour, cherchant à le faire connaître, à le partager aux autres selon notre appel personnel. Le zèle s’exprime aussi dans l’action : « Ayez du zèle et non de la paresse. Soyez fervents d’esprit et servez le Seigneur » (Rm 12, 11). En effet, il est ce feu qui brûle en nous et qui nous pousse à faire des choses que l’on n’aurait jamais osées auparavant, comme les apôtres lors de la Pentecôte.
Une nécessité
Le pape François déclare dans son cycle de catéchèses consacrées à l’évangélisation que « lorsque la vie chrétienne perd de vue l’horizon de l’annonce, elle tombe malade » et que « sans zèle apostolique, la foi se dessèche ».
Dans la perspective paulinienne, le zèle est un élément constitutif de l’armure que doit revêtir le chrétien pour le combat spirituel : « […] mettez pour chaussures à vos pieds le zèle que donne l’Évangile de paix » (Ep 6, 15). Le zèle, traduit ici par le grec etoimasia, est associé non seulement à l’attitude de celui qui se tient en alerte, prêt à agir, mais aussi à l’idée d’avoir un appui ferme et stable pour avancer quels que soit le terrain et les difficultés.
Nous pouvons aimer le Seigneur, mais si nous manquons de zèle, nous risquons d’être stoppés par les attaques de l’Adversaire. De même qu’on ne peut faire de la route ou courir sans chaussures adaptées, on ne peut servir le Seigneur jusqu’au bout sans le zèle apostolique.
Entretenir le feu
Quand notre zèle apostolique commence à décliner, il nous est bon, en premier lieu, de nous poser la question de notre foi au Christ et de laisser s’enraciner en nous cette vérité : Jésus est la réponse de Dieu aux défis de l’humanité, en tout temps. Inspirons-nous souvent de la ferveur des saints prédicateurs et évangélisateurs dont la vie fut donnée à l’apostolat et favorisons les attitudes qui nous ouvrent à l’action de l’Esprit Saint. En effet, « on peut dire que l’Esprit Saint est l’agent principal de l’évangélisation : c’est lui qui pousse chacun à annoncer l’Évangile et c’est lui qui dans le tréfonds des consciences fait accepter et comprendre la Parole du salut », comme le dit le Concile œcuménique Vatican II dans son décret sur l’activité missionnaire de l’Église (Ad gentes, n° 4).
Conclusion
On peut donc, dans un premier temps, rappeler que le principal domaine où nous devons avoir du zèle est celui de notre vie spirituelle, car tout ce que nous faisons pour le Royaume doit être le fruit de notre relation avec le Saint-Esprit.
Le zèle apostolique s’enracine dans l’oblation de soi ; il se vit dans la charité fraternelle. Il est aussi l’Esprit qui anime la vie missionnaire. Tout, cependant, doit être pour la gloire de Dieu. Il est la ferveur qui s’exprime en dévouement, en sollicitude, en service et en fidélité. Le zèle apostolique a pour finalité ultime le salut des âmes et répond par là au désir du Christ d´embraser le monde du feu de son Amour.
Le zèle apostolique permet de marcher sans risque de se blesser tel un soldat chaussé pour le combat, quelles que soient les difficultés du terrain. Les apôtres ont su braver toutes les oppositions et les menaces, ils ont été victorieux (cf. Ac 4, 20).
Nous avons besoin d’avoir du zèle non seulement pour avancer à la suite du Christ mais aussi pour courir au combat lié à l’annonce de l’Évangile. Prions pour obtenir ce zèle qui nous fortifie dans notre témoignage et donne à notre intention de servir le Seigneur d’aller jusqu’au bout. Demandons donc l’Esprit de force, de détermination, de ferveur, d’enthousiasme pour être des témoins zélés et pouvoir ainsi inspirer aux autres le désir de connaître le Christ.
Critères du bon zèle apostolique
Doudou Callens dégage quelques repères pour caractériser le zèle qui vient de Dieu :
- Un tel zèle est éclairé par la volonté de Dieu et s’oppose à l’attitude de celui qui cherche par lui-même ce qu’il aimerait faire pour Dieu.
- Un tel zèle est désintéressé. Il vient de la gratuité de la disponibilité à faire la volonté de Dieu.
- Un tel zèle procède de l’amour pour Dieu. Cela suppose l’oubli de soi pour la joie de Celui que l’on sert.
- Un tel zèle implique de faire de la volonté de Dieu sa demeure. Cela se manifeste par un abandon entre les mains de Dieu et une confiance toute filiale envers Lui.
La citation
« Gardons donc la ferveur de l’esprit. Gardons la douce et réconfortante joie d’évangéliser, même lorsque c’est dans les larmes qu’il faut semer. Que ce soit pour nous […] un élan intérieur que personne ni rien ne saurait éteindre. Que ce soit la grande joie de nos vies données. »
Saint Paul VI
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