Les saints sont inimitables ; ils sont absolument uniques, de l’absolu de Dieu. Chacun est invité à écrire une page radicalement neuve de l’histoire sainte de Dieu avec les hommes, une page que jamais personne n’écrira plus. Le bon Curé d’Ars n’échappe pas à cette règle, il est absolument hors norme. Sa sainteté est surnaturelle, il vivait du Royaume qui avait fait irruption dans le village d’Ars, réponse au désir ardent de son cœur d’aimer Dieu par-dessus tout. La vie du Curé est alors devenue une prophétie, une parole de Dieu pour son temps.
Pour mieux comprendre quelle fut sa prière, il convient de le replacer dans le contexte historique, culturel et spirituel qui fut le sien. À la naissance du saint Curé, l’Église de France était encore imprégnée de certaines idées jansénistes venues du XVIIème siècle. L’image d’un Dieu vengeur, sévère, dont il faut apaiser la colère par l’offrande de pénitences et de sacrifices était encore présente dans les mentalités. On croyait au petit nombre des élus, et le risque de la damnation éternelle était pris très au sérieux. Les idées révolutionnaires étaient aussi déjà répandues et avaient éloigné de nombreuses personnes de la foi. Des prêtres avaient signé la convention républicaine, renonçant à leur promesse d’obéissance à leur évêque. Des fidèles de plus en plus nombreux abandonnaient la pratique, et certaines églises étaient désertes.
Cette situation explique le zèle du Curé pour le salut des âmes, et sa volonté de s’offrir tout entier pour les pécheurs, dont il se considérait le premier. On peut aussi comprendre la dureté apparente de ses sermons et son attitude exigeante envers ses paroissiens. Sa sévérité était en fait motivée par un amour ardent, et par la bonté de son cœur de pasteur.
Bienheureux les cœurs purs
La béatitude des cœurs purs semble s’être incarnée dans la vie de saint Jean Marie Vianney. Elle est la clé pour comprendre sa prière et sa sainteté. Le bon Curé ne cherchait pas d’autre récompense que celle de servir le Christ comme il le faisait, et s’en jugeait même indigne. Il ne gardait jamais rien pour lui, et se dévouait sans compter pour ses paroissiens, pour les foules qui venaient le visiter à Ars. Un jour, un paroissien lui demanda pourquoi, à l’élévation de la Messe, il gardait si longtemps le Saint-Sacrement dans ses mains. Il répondit avec simplicité : c’est que, si j’allais en enfer, je l’aurais au moins tenu avec moi. Une autre fois, on le surprit pleurant auprès d’une statue de la Vierge Marie. Interrogé, il répondit : « Ah, si je vais en enfer, que du moins je puisse l’emmener avec moi ! » Il avait en effet reçu la grâce de connaître son état de pécheur, et était convaincu de mériter d’être damné. Cette terrible épreuve spirituelle, loin de le décourager, avait produit, grâce à son offrande, sa pureté transparente et lumineuse qui attirait les foules. Elle avait révélé le secret de son cœur, celui d’aimer en toute gratuité et de servir sans rien attendre en retour, pas même la vie éternelle.
Ascèse et sacrifice
Dès son plus jeune âge, l’enfant Vianney s’est attaché aux choses divines, à l’amour du Christ qu’il aimait de tout son cœur. Ayant rencontré, dans son enfance, des confesseurs de la foi qui avaient risqué leur vie pour rester fidèles à leur sacerdoce et à l’Église, il prit la décision de se consacrer lui aussi, et de devenir prêtre en donnant toute sa vie, comme ces témoins. Il le fera jusqu’au martyr d’amour, en s’infligeant des pénitences qui, au dire d’un de ses biographes, auraient été rapidement mortelles pour d’autres que lui. Ses proches étaient effarés par les disciplines qu’il s’imposait et faisait tous leurs efforts pour tenter d’adoucir ses austérités, mais en vain. Il était fortifié et encouragé par l’Esprit qui lui donnait un courage surnaturel. C’était son moyen de résister à l’Ennemi qui venait le visiter pendant la nuit. Les textes qui nous racontent ses combats contre l’ange des ténèbres sont presque drôles : avec un cœur d’enfant, le Curé ne s’effraie pas de voir les meubles de sa chambre bouger autour de lui, d’entendre des cris affreux ou des locomotives traverser sa maison, etc.
« Ce n’est que le « grappin« », disait-il. Aucune trace de dramatisation ou de plainte dans ces récits qui ne laissent que deviner la souffrance terrible endurée lors de ces passages.
Confiance absolue
La confiance du saint dans la Providence est aussi une caractéristique de sa prière. Il ne comptait pas sur ses mérites pour obtenir les grâces divines, étant convaincu qu’il n’en avait aucun. Il ne pouvait s’appuyer que sur sa foi illimitée en la bonté de son Père. Il ne s’étonne pas de voir le blé se multiplier, ou de constater d’autres miracles, comme la connaissance du cœur de ses pénitents ; son cœur pur reçoit ces faveurs avec naturel, et sans retour sur lui-même.
Ses deux amours
Les pèlerins étaient frappés de voir le saint prêtre célébrer la Messe, et manifester tant d’amour pour le Saint-Sacrement. C’était pour lui le grand moment de chaque journée. On dit qu’il se hâtait pendant la première partie de la prière, pour rester le plus longtemps possible avec la Présence après la consécration, parfois en pleurant. Sa prière était un véritable témoignage.
Dès son enfance, il montra une grande dévotion à la Vierge Marie, qu’il honorait de toutes sortes de manière, notamment par la prière du rosaire. Elle était sa compagne fidèle, sa protectrice et sa consolation.
Devoir d’état
Le Curé d’Ars a vécu la spiritualité simple et exigeante du devoir d’état avec un zèle extraordinaire : il n’a rien fait d’autre que d’être le curé de sa paroisse, mais il l’a fait avec l’ardeur surnaturelle d’un grand saint. Il s’est sanctifié en faisant le catéchisme, en priant, en célébrant l’eucharistie et en confessant. Ces tâches sont celles de tous les curés de paroisse, mais lui les a accomplies de manière éminente. Il s’est sanctifié en faisant chaque jour les tâches que réclamait sa fonction.
Prions notre saint patron de nous donner le désir d’être saints, chacun à sa manière, en renonçant au découragement et à la tiédeur, et en écoutant l’Esprit de sainteté qui ne cesse d’œuvrer en son Église.
Extrait d’une neuvaine au Curé d’Ars
Saint Jean-Marie Vianney, malgré les contradictions, les épreuves et les difficultés, vous vous êtes abandonné avec confiance à la Providence et à ses desseins. Vous avez toujours voulu ne faire que la volonté de Dieu, même si sa réalisation semblait parfois insurmontable ou différente de vos propres projets. Vous avez été le confident de bien des intentions, des peines ou de prières, et vous les avez remises entre les mains de Dieu ou de ses saints. Saint Curé d’Ars, vous qui avez compté totalement sur Dieu, obtenez-moi une confiance profonde et filiale en la Providence Divine. Que l’espérance d’être avec Dieu pour l’éternité emplisse mon cœur de courage et de paix. Que la fidélité de Dieu m’invite, comme vous, à m’abandonner toujours plus à Sa volonté, malgré mes pauvretés, les épreuves ou les difficultés de toutes sortes. Que l’offrande quotidienne de ce que je suis, de ce que je fais, de mes croix et de mes joies, donne un sens à ma vie.
NEUVAINE AU SAINT CURÉ D’ARS – Sanctuaire d’Ars
La citation
« Dieu n’a pas besoin de nous : s’il nous commande de prier, c’est qu’il veut notre bonheur, et que notre bonheur ne peut se trouver que là. »
Saint Curé d’Ars
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