« Dans l’horaire des journées, on consacrera un temps suffisant à la Lectio divina, afin de se laisser éclairer, nourrir et façonner par la Parole de Dieu, » lit-on dans les Statuts de la Communauté des Béatitudes.
Cette Parole, les fondateurs de la Communauté, venus du protestantisme, en ont transmis l’amour dès le début à leurs frères et sœurs. Nous l’entendons et nous la chantons à la Messe, pendant les offices et les soirées de prière. D’une manière forte, une Parole demandée au Seigneur et reçue au cours des vêpres, nous accompagnait (ou nous accompagne toujours) dans notre vécu quotidien. Alors, pourquoi la Lectio divina ? qu’apporte-t-elle de plus ?
Écoutons d’abord une réponse de Benoît XVI à ces questions : « Je voudrais surtout évoquer et recommander l’antique tradition de la Lectio divina : la lecture assidue de l’Écriture sainte, accompagnée par la prière, réalise le dialogue intime dans lequel, en lisant, on écoute Dieu qui parle, et, en priant, on lui répond avec une ouverture confiante. Cette pratique, si elle est promue efficacement, apportera à l’Église, j’en suis convaincu, un nouveau printemps spirituel. » Qui ne souhaiterait ce « printemps », pour lui-même et pour tous ?
Regardons à présent les fruits de cette Lectio divina.
Une lumière
Dans la Lectio, nous sommes en contact prolongé avec Celui qui se dit lui-même « lumière du monde. » Dans une écoute attentive, en interrogeant la Parole reçue, en priant à partir d’elle, nous apprenons à mieux connaître le cœur de notre Dieu, tel qu’il veut se révéler à nous. Nous accédons aussi, peu à peu, à une connaissance plus profonde de nous-mêmes et du cœur humain.
La Parole, accueillie plus en profondeur dans la Lectio, va éclairer nos pensées et notre comportement quotidien. Elle va nous aider, dans les choix petits et grands que nous avons à poser, à nous comporter en « enfants de lumière ». Elle deviendra, de plus en plus, « lampe sur nos pas ».
« Vivante, efficace et incisive », elle nous aidera à faire le tri, en nous, entre ce qui est digne d’un disciple de Jésus, et ce qui ne l’est pas.
Une nourriture
Bien souvent, la Parole de Dieu a été comparée à une nourriture vitale pour l’homme. Jésus, reprenant une parole adressée à Israël au désert (cf. Dt 8, 3), le dit clairement dans son propre combat au désert : « Ce n’est pas de pain seul que vivra l’homme, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. » (Mt 4, 4) Les auteurs anciens parlent de « remâcher » et « ruminer » la Parole ; on utilise aussi le terme de « manducation ». Cela signifie qu’on va prendre le temps de répéter, de retourner longuement tel verset dans notre bouche, pour le faire descendre dans notre mémoire et notre cœur : il en sera enrichi et transformé.
Saint Bernard souligne la « délectation » de cette opération : « Je rumine ces choses avec suavité, tout mon être s’emplit de joie, tout en moi se repaît, de mon corps germe la louange. » Cela suppose de s’asseoir quelque temps dans la méditation de la Parole : au moins le temps d’un vrai repas !
Dans la Lectio, cette « descente » de la Parole dans notre cœur va nous conduire à la prière et à une rencontre avec le Seigneur : elle peut donc aussi nourrir notre temps d’adoration, quand la contemplation ne nous y est pas spontanément donnée.
Quelqu’un demanda à Abba Abraham de lui copier le psaume 33.
Il se contenta de copier le verset 15 : « Détourne-toi du mal, fais le bien, recherche la paix et poursuis-la. », disant au frère : « Pratique d’abord cela, et ensuite, je t’en écrirai plus ». (Anonyme du 4ème siècle)
Un renouvellement
La Parole de Dieu est créatrice, comme toute la Bible nous le montre. « Dieu dit, et cela est ; il parle et cela existe. » (Jdt 16, 14). Jésus, Verbe fait chair, d’une seule Parole brève, fait sortir Lazare, mort depuis quatre jours, de son tombeau. Une seule de ses paroles, accueillie avec foi et une attention complète, suffirait certainement à nous relever et nous recréer.
Mais nous savons que, dans la multiplicité des paroles que nous entendons et prononçons, entendre une seule fois : « Debout, resplendis, car voici ta lumière ! » ne suffit généralement pas pour que cette parole nous atteigne et puisse nous donner toute la « vie » qui est cachée en elle. Nous avons besoin de ralentir notre rythme de lecture habituel, pour l’accueillir dans notre cœur comme une petite « graine » de vie. Il nous faut lui donner du temps, la méditer, l’interroger, la laisser devenir prière, pour qu’elle pousse des racines profondes dans notre mémoire, puis dans notre comportement. Et aussi veiller à ce que « les ronces et les épines » ne l’étouffent pas, et ne l’empêchent pas de venir à maturité…
En lui donnant un temps suffisant chaque jour, nous voyons que la Parole – avec douceur et parfois avec vigueur – nous retravaille et va nous donner notre vrai visage de fils et fille du Père.
La méditation a donc un pouvoir de renouvellement de notre cœur, comme l’exprime bien le père Matta El Maskîne dans L’expérience de Dieu dans la vie de prière : « On constate que la persévérance du cœur dans la méditation des Écritures se traduit toujours par une infusion de vie véritable dans le cœur ; car la Parole de Dieu, comme nous l’a définie le Seigneur, est Esprit et Vie (…). La méditation de la Loi de Dieu garde le cœur vivant, réchauffé au feu de la Parole divine ; car la méditation englobe fondamentalement l’approfondissement permanent de l’esprit des Écritures, et la recherche des vérités cachées derrière le commandement. Ce qui a pour résultat de toujours renouveler les pensées de l’homme, d’affiner sa sensibilité, de la rendre plus évangélique, et de lui conférer un comportement souple et aisé, ouvert de façon positive à toutes les éventualités. »
Dans la Lectio, nous recevrons encore d’autres trésors : « Dans les saints Livres, en effet, le Père qui est aux cieux vient avec tendresse au-devant de ses fils, et entre en conversation avec eux ; or, la force et la puissance que recèle la Parole de Dieu sont si grandes qu’elles constituent pour l’Église, son point d’appui et sa vigueur, et, pour les enfants de l’Église, la solidité de leur foi, la nourriture de leur âme, la source pure et permanente de leur vie spirituelle. » (Dei Verbum n° 21)
Dans le prochain article, nous nous pencherons sur la question : « La Lectio : comment ? »
La citation
« Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole, et mon Père l’aimera, et nous viendrons vers lui, et nous nous ferons une demeure chez lui. » (Jn 14, 23)
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