Vie d’Oraison : La docilité à l’Esprit Saint (n°56)

Le don de Dieu

« Le but de la vie chrétienne, c’est l’acquisition du Saint-Esprit » (Saint Séraphim de Sarov) : raccourci sublime… et étonnant ! Acquérir ? oui, mais celui qui nous rend « pauvres dans l’Esprit » et nous conduit à la béatitude. Nous l’avons reçu à notre baptême, il nous faut néanmoins acheter le champ où se trouve ce trésor.

L’Esprit Saint nous donne tout : il est « Seigneur » et « donne la vie » (Credo de Nicée), il fait connaître le Père, dévoile le Christ et unit à lui et en lui les enfants du Père. Il fait de chacun d’eux son temple, inspire leur prière et leur louange. Il se donne à travers les Écritures qu’il a inspirées, la Tradition et la vie de l’Église, tout spécialement dans les sacrements. Il est Défenseur et Consolateur, notamment dans le témoignage. Don du Ressuscité, il conduit à la réconciliation avec Dieu, au pardon des péchés. Âme de l’Église, il ne cesse de la renouveler, de l’orner de charismes pour l’édification mutuelle des croyants et pour l’évangélisation dont il est le protagoniste. Il comble de ses dons et de vertus ses membres. Il les transforme afin que grandisse leur sainteté, rayonnement de ses fruits.

La loi de l’Esprit…

Survenu au jour de Shavouot, fête du don de la Torah, il est la loi nouvelle prophétisée par Jérémie (cf. Jr 31, 33), écrite sur les cœurs, affranchissant de la loi de la mort et du péché (cf. Rm 8, 2). Infusant en l’homme l’amour de Dieu, il le rend capable de vivre l’exigence du sermon sur la montagne. Son amour, sans contraindre, attire l’homme et le transforme. Il est ce dynamisme nouveau, intérieur, dont parle saint Thomas d’Aquin.

… et les œuvres de la chair

Raniero Cantalamessa s’interroge : ce don gratuit qui donne le désir d’obéir au commandement de l’amour, en réponse à l’Aimé, comment se fait-il que l’homme soit si souvent retenu de le vivre ? La réponse est donnée dans l’épître aux Romains : « Si vous faites mourir les œuvres de la chair, alors vous vivrez » (Rm 8, 13).

La docilité à l’Esprit Saint demande de vivre humblement la mortification – elle-même fruit de l’Esprit – que Kierkegaard compare pertinemment à l’apprentissage de la langue de l’aimé. L’Esprit vient nous libérer de notre « moi », il nous demande de collaborer, petitement le plus souvent (retenir un mouvement d’impatience ou un regard, une parole ; éviter le zapping ; vivre les petites fidélités à la Règle ; etc.) et en tout premier lieu par une vie humble, obéissante aux autres et à l’Église. Ainsi nous pouvons vivre de cette lumière de l’Esprit dont Yves Congar dit qu’elle est extrêmement forte et terriblement fragile.

À l’école de l’Esprit Saint

La Communauté des Béatitudes invite dans ses Statuts (cf. SG n°7) à vivre dans l’Esprit, entre autres en priant avec le peuple de la première alliance. Nous découvrons chez ce dernier de belles icônes de cette obéissance à Dieu, tel Syméon : poussé par l’Esprit au Temple, il veille dans la prière, reconnaît et accueille dans ses bras le Sauveur. Cela souligne le fort appel à la prière, à l’écoute de l’Esprit Saint « dans le temple » que nous sommes. Le monachisme oriental, très tourné vers l’Esprit (cf. la transfiguration de saint Séraphim de Sarov) ne nous dit pas autre chose en nous enseignant la prière continuelle.

La Vierge Marie est tout accueil de l’Esprit, qui l’a épousée au jour de l’Annonciation. Elle écoute et elle obéit. Elle nous invite à son école maternelle. La consécration à Marie est un moyen privilégié d’ouverture et d’obéissance à l’Esprit. Avec elle nous apprenons à fixer notre regard sur le Christ. Nous pouvons préférer le faire en la regardant elle-même, avec saint Louis-Marie Grignion de Montfort qui nous encourage à nous faire une idée ou image de Marie « en nous » (cf. Le secret de Marie § 47) ou avec saint Bernard qui nous invite à regarder l’étoile en tout péril, en toute tentation (cf. Super Missus est, 17), recevant par elle lumière, paix et amour, fruits de l’Esprit.

La Parole de Dieu, lue et méditée comme le faisait Marie, est un lieu de l’Esprit par excellence. Là, il parle, il façonne, il redresse, il affermit, il envoie (cf. par exemple l’appel de saint Antoine), il console, etc. La Parole vient « garder » notre cœur de paroles vaines et produit son fruit en son temps. Présente en nous, elle pourra facilement jaillir en paroles inspirées.

À Cana, Marie voit le manque lors de lafête (cf. Jn 2) : l’Esprit ouvre aux autres, il construit la fraternité, nous donne de vivre « en relation » comme lui, comme personnes en dialogue et en tenue de service, non autocentrées. C’est en étant tournés vers le Seigneur et vers les autres que nous pourrons vivre de lui.

Les charismes concrétisent pour leur part ce service mutuel et ce service de l’évangélisation. La vie charismatique humblement vécue est une école précieuse de docilité au Saint-Esprit. Par l’Esprit, notre vie « n’est plus à nous-mêmes, mais à celui qui est mort et ressuscité pour nous » (cf. 2 Co 5, 15).

La pratique de l’action de grâces et de la reconnaissance nourriront cette charité et ce « décentrement de soi » : avant et après un bon repas, devant un paysage, un travail accompli, etc. Tout ceci nous permet de demeurer ouverts aux influences du « Tout-aimant », et de tout lui remettre.

Relecture

La relecture de la journée est très précieuse. « Esprit Saint, à quel moment m’as-tu parlé, visité ? Par les Écritures, par quelqu’un, par un événement ? M’a-t-il été donné aujourd’hui de vivre une rencontre, un travail, un service, un temps de prière, où tu as été particulièrement présent, où tu es passé à travers moi ? À quel moment n’ai-je pas été à l’écoute, ai-je résisté ? ». Pardonnés pour les manquements, nous nous ouvrons à une nouvelle « aventure » avec l’Esprit Saint chaque jour, apprenant peu à peu à nous ajuster à ce Souffle de Vie.

Viens Saint-Esprit

Dès le début des laudes, et à nouveau aux vêpres, la Communauté des Béatitudes invoque le Saint-Esprit. Il est Celui que nous devons désirer et appeler tout au long du jour. Ainsi nous pourrons lui obéir comme la primitive Église des Actes des Apôtres. Méditons l’incroyable épisode de Pierre chez Corneille (cf. Ac 10, 23-48). Oui, la docilité au Saint-Esprit permet de poser les pas les plus magnifiques et improbables, comme de vivre la fidélité dans des actes moins visibles mais non moins inspirés et féconds, à l’image de Syméon et Anne.

Nous sommes appelés à mendier sans cesse le Saint-Esprit, personnellement et communautairement, comme dans un cénacle toujours renouvelé afin qu’il nous conduise toujours plus dans sa ferveur.

La citation

«Qu’importent les qualités naturelles ! La grande qualité, la grande richesse, c’est d’être pris par l’Esprit Saint.»

Père Marie-Eugène

 

 

Pour aller plus loin…

Rien que pour aujourd’hui :

  • Je prends un temps de relecture de ma vie à la lumière de ces questions :

    • Quel est le lieu où je suis plus fragile, où « la loi de la chair » est souvent souveraine en moi, limitant un déploiement de la vie dans l’Esprit ?

    • Qu’est-ce que le Seigneur m’a donné personnellement comme moyen privilégié ou comme appel particulier qui me « connecte » à l’Esprit Saint, qui m’aide à demeurer ou retrouver la grâce et la liberté de me donner en lui ?

Livres :

  • La sobre ivresse de l’Esprit, Raniero Cantalmessa, DDB.

  • Je crois en l’Esprit Saint, Yves Congar, Cerf.

 

Retrouvez les articles précédents de notre série « Vie d’oraison ».
(publication éditée par des frères et sœurs de la Communauté des Béatitudes – ©droits réservés).

Oraison

Ces articles sur la vie d'oraison sont extraits du bulletin mensuel "Il est là !" publié à l'usage des membres de la Communauté des Béatitudes et de leurs amis. Il est rédigé par un collectif de laïcs, prêtres, frères et sœurs consacrés, membres de la Communauté, avec le désir de stimuler la vie de prière, essentielle à la vocation aux Béatitudes comme à toute vie chrétienne authentique... C'est pourquoi nous sommes heureux de vous partager ces contenus simples.

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