La détermination (n°67)

Le terme « détermination » renvoie assez spontanément, pour qui possède quelque base de formation carmélitaine, à sainte Thérèse d’Avila, fort connue pour insister sur la nécessité de celle-ci. Il ne faudrait cependant pas se méprendre à ce sujet. La Madre ne fait pas dépendre la fécondité de notre vie spirituelle d’une espèce de volontarisme à la force du poignet. Son expérience lui a bien au contraire montré l’impasse d’une telle voie. Mais elle nous interpelle sur la grande nécessité d’investir notre volonté – capacité d’aimer – à la suite du Christ.

Indispensable détermination

« Comment faut-il débuter ? Je le répète, ce qui est d’une importance majeure, d’une importance capitale, c’est d’avoir une résolution ferme, une détermination absolue, inébranlable, de ne pas s’arrêter avant d’avoir atteint la source [de l’union à Dieu], quoi qu’il arrive ou puisse survenir, quoi qu’il en puisse coûter, quelques critiques dont on soit l’objet, qu’on doive arriver au but ou mourir en chemin, accablé sous le poids des obstacles, quand le monde enfin devrait s’effondrer ! » Le propos est clair et percutant, qui plus est si on se réfère au texte original de ce passage du Chemin de perfection (21,2) où Thérèse parle d’« une grande détermination très déterminée ». Mais la Madre, comme à son habitude, ne se contente pas de nous exhorter. Elle argumente son propos, s’adressant à notre intelligence, réveille notre désir et essaie d’enflammer notre cœur, donc de nous motiver en profondeur.

Pourquoi donc cette détermination est-elle si importante dans notre chemin vers l’union à Dieu, but de notre vie ici-bas ? Tout d’abord parce que cela en vaut la peine ! La beauté du but justifie notre engagement. Ensuite, parce que les difficultés ne manqueront pas ; il s’agit donc de ne pas se laisser arrêter ou ralentir en chemin. Enfin, parce que d’importants enjeux sont attachés à notre persévérance dans la vie spirituelle : « Je crois que celui qui commence avec le secours de Dieu à marcher résolument vers le sommet de la perfection ne va jamais seul au ciel. Il entraîne toujours une foule à sa suite » (Vie 11,4).

Insuffisante détermination

Thérèse, qui enseigne toujours à partir de sa propre expérience, a cependant appris, non sans peine ni douleur, que notre (bonne) volonté, aussi ferme soit-elle, ne saurait suffire. Dieu ne se conquiert pas. La vie spirituelle n’est pas affaire d’exploits personnels et de réussite. Qui s’appuie sur ses seules forces ne parviendra jamais au but.

Ainsi, la détermination, pour être féconde, devra toujours aller de pair avec une profonde humilité. Celle-ci consistera avant tout, ici, à tout attendre de Dieu et à faire preuve de patience et de confiance. Il s’agit donc, certes, de faire notre part, mais de comprendre et d’expérimenter peu à peu notre profonde incapacité à nous sauver et transformer par nous-mêmes. La détermination attendue de nous revêt donc également le visage du consentement, de l’ouverture à l’œuvre de Dieu : « Ce qu’il demande, c’est une détermination qui le rende maître de notre libre arbitre » (Pensées sur l’amour de Dieu 3,6). Dieu n’attend pas de nous que nous soyons des héros, des champions de la sainteté, mais que nous lui laissions prendre en nos vies toute la place qui lui revient.

« Croyons fermement qu’avec le secours divin et des efforts, nous pourrons arriver peu à peu – ce ne sera pas en un instant – là où sont parvenus tant de saints aidés par la grâce » (Vie 13,2), affirme encore Thérèse. Cette union à Dieu fait donc l’objet d’un long processus, qui aboutira – quelle heureuse nouvelle ! – puisqu’il dépend de Dieu, mais qui demandera de nous patience, persévérance et approfondissement constant de notre confiance en la puissance de sa grâce.

Le juste casting

Une des clés de la vie spirituelle sur laquelle Thérèse – et plus largement la spiritualité carmélitaine – insiste beaucoup, est que notre rôle consiste avant tout à nous disposer à l’œuvre de Dieu en nous et à travers nous. C’est donc lui qui a le rôle principal. Un rôle qu’il ne peut « jouer » si nous ne lui permettons pas de le faire. Un rôle que nous pouvons parfois, sans le vouloir, lui dérober, misant beaucoup trop sur nous-mêmes et lui laissant trop peu les rênes de nos vies. Ainsi Dieu va-t-il peu à peu façonner nos cœurs pour que nous apprenions à « lâcher prise », non pas en nous déresponsabilisant, mais en nous situant à notre juste place, celle de créature, celle de collaborateur actif et confiant en l’œuvre qui est la sienne.

« En-dehors de moi, vous ne pouvez rien faire »

(Jn 15,5), nous dit Jésus… non pour nous abaisser, mais pour nous libérer ! Il est tellement bon en effet d’expérimenter que c’est Dieu qui est le garant de notre vie. Cela allège considérablement nos épaules. Quel est notre rôle en tout cela ? Nous engager de tout notre être pour que le Seigneur trouve en nous un cœur ouvert, disponible, et que nous mettions le moins d’obstacles possibles à son action en nous et à travers nous. Cela passe par une ferme détermination en actes, en particulier dans la fidélité à la vie d’oraison. Rappelons-nous à ce sujet que vie d’oraison signifie non seulement temps de prière offerts fidèlement à Dieu mais aussi recherche de cohérence entre ces temps et le reste de notre existence.

Tu parviendras…

« Tu parviendras… ». Ainsi se termine la Règle de saint Benoît. Et Thérèse de nous dire : « Quiconque voit en soi une telle détermination n’a rien à craindre, rien absolument » (Vie 11,12). Oui, nous arriverons au but, nous parviendrons, mais non au sens d’une réussite toute humaine… Quel encouragement pour chacun de nous !

Thérèse peut nous apporter encore un précieux éclairage pour rassurer nos cœurs sur ce chemin, s’il était besoin. « Dieu conduit les âmes par des voies différentes » (Fondations 18,6), nous dit-elle. Dieu saura toujours s’adapter à nous, à notre particularité, à notre rythme. Nous n’avons rien à craindre de lui. L’important est qu’aujourd’hui, tels que nous sommes et là où nous en sommes, nous choisissions résolument de le suivre. Si nous manquons de confiance et de détermination, ne baissons pas les bras, mais mendions sa grâce et confions-nous à l’intercession de la Vierge Marie et de la Madre. Ainsi, non seulement chacun de nous parviendra, mais mieux encore, c’est ensemble que nous parviendrons…

Bénédiction d’une maison

Tu es béni, Dieu notre Père, toi qui as protégé les maisons des hébreux par le sang de l’Agneau pascal, tu nous as donné en ton Fils Jésus l’Agneau véritable qui nous sauve par sa mort. Nous t’en prions : protège, réconforte et défends ceux qui habitent cette maison.

Tu es béni, Seigneur Jésus ressuscité, toi qui es entré au soir de Pâques dans la maison d’Emmaüs, avec deux de tes disciples, nous t’en prions : entre et demeure dans cette maison, manifeste ta présence à ceux qui s’y trouvent.

Tu es béni, Esprit Saint, toi qui es partout présent et qui fais de nous ta demeure, nous t’en prions : fais vivre dans l’amour ceux qui habitent sous ce toit et ceux qui y seront accueillis.

Prière de bénédiction 491E

 

La citation

« « De nos efforts, il n’a nul besoin. Notre Seigneur se plaît au contraire à faire resplendir ses merveilles chez les plus faibles de ses créatures, parce qu’il peut alors plus librement déployer son pouvoir.  »

Sainte Thérèse d’Avila

 

 

Pour aller plus loin…

Rien que pour aujourd’hui :

  • Je peux remercier le Seigneur pour le désir qu’il a mis en mon cœur de le suivre, et lui demander de fortifier ma détermination et ma confiance en la puissance de sa grâce.

  • Je peux demander au Seigneur de m’éclairer sur mon positionnement face à lui, sur la manière dont je le laisse « jouer » son rôle et dont j’assume le mien.

Lectures

  • Chemin de perfection, sainte Thérèse d’Avila, chapitre 21.

  • En chemin avec Thérèse d’Avila, Luc-Marie Perrier, ocd, Ed. du Carmel, p. 28-36.

  • Je veux voir Dieu, père Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus, Ed. du Carmel, deuxième partie, chapitre II.

Retrouvez les articles précédents de notre série « Vie d’oraison ».
(publication éditée par des frères et sœurs de la Communauté des Béatitudes – ©droits réservés).

Oraison

Ces articles sur la vie d'oraison sont extraits du bulletin mensuel "Il est là !" publié à l'usage des membres de la Communauté des Béatitudes et de leurs amis. Il est rédigé par un collectif de laïcs, prêtres, frères et sœurs consacrés, membres de la Communauté, avec le désir de stimuler la vie de prière, essentielle à la vocation aux Béatitudes comme à toute vie chrétienne authentique... C'est pourquoi nous sommes heureux de vous partager ces contenus simples.

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