Le nom définit ce qu’il y a de plus profond dans un être, son essence, son identité, sa vocation et sa mission. À Joseph est révélé celui du Rédempteur : « Tu Lui donneras le nom de Yèshoua, car Il sauvera son peuple de ses péchés » (Mt 1,21).
À l’origine
D’après Paul, la prière chrétienne se termine par une louange (cf. Rm 16,27). Les Pères achèvent lettres ou prédications par une doxologie, comme Clément de Rome (+ 100) : « Le souverain Créateur est plus que prodigue envers nous qui recourons à ses miséricordes, par Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui soit la gloire dans les siècles des siècles. » Le nom de Jésus est souvent invoqué, remarque Irénée (+ 202) : « On ne peut dire le nombre de grâces que l’Église obtient de Dieu pour le monde entier, au nom du Christ Jésus. » Les textes révélant une vraie dévotion au nom de Jésus se multiplient, comme le célèbre poème de Paulin de Nole (+ 431) : « C’est dans la bouche un nectar, sur la langue un rayon de miel ; c’est un fruit savoureux qu’il est impossible d’abandonner une fois qu’on y a goûté ; douceur pour le cœur, brillante lumière pour les yeux et pour les oreilles, parole de vie… » Ainsi, le Nom est savouré, murmuré amoureusement et manduqué de tout son corps. Augustin (+ 430) exhale la piété profonde, nuancée de tendresse, que ce Nom lui inspirait. « Ce nom de mon Sauveur avait été bu tendrement par mon cœur d’enfant avec le lait même de ma mère : il y était demeuré au fond ; et sans ce Nom, nul livre ne pouvait me ravir tout entier. » Remarque délicate qui dévoile l’attrait de son auteur. Faisons de même : gardons le Nom béni sans cesse sur nos lèvres et au cœur.
Le grand essor
La piété occidentale se caractérise par une dévotion tendre à la sainte humanité de Jésus : l’affection portée à son Nom est l’un de ses aspects principaux. Anselme de Cantorbéry (+ 1109) marqua d’une empreinte profonde la spiritualité du Nom. « Ô doux nom, nom délectable qui réconforte le pécheur, nom plein d’heureux espoir ! Qu’est-ce, en effet, que ce nom sinon sauveur ? Donc, Jésus, à cause de votre nom, soyez-moi Jésus, ô Vous qui m’avez fait afin que je ne périsse pas. » Ainsi, le ton est donné : l’amour se plaît au nom de l’Aimé. C’est sa Personne que nous aimons lorsque nous prononçons son Nom. Bernard de Clairvaux (+ 1153) commente « Ton Nom est une huile répandue » (Ct 1,3). « Pourquoi est-ce une huile ? Il y a sans doute de la ressemblance entre l’huile et le nom de l’Époux. Pour moi, l’huile a trois qualités : elle éclaire, elle nourrit, elle oint. Elle entretient la flamme ; elle nourrit la chair ; elle calme la douleur. Elle est lumière, aliment, remède. On peut en dire autant du nom de l’Époux. Il éclaire lorsqu’on l’annonce ; il nourrit quand on se le rappelle ; il est l’onction qui soulage quand on l’invoque. » Faisons donc l’expérience de sa puissance en recourant à sa Présence.
Trois auteurs contribuèrent à faire aimer le nom de Jésus.
En Angleterre, Richard Rolle (+ 1349) voyait dans l’invocation le fondement de la vie spirituelle. « Fixez le nom de Jésus si avant dans votre cœur qu’il ne puisse jamais sortir de votre pensée… Gardez-le continuellement dans votre mémoire : il effacera vos péchés et enflammera votre cœur ; il purifiera votre âme, en fera disparaître la colère et détruira la paresse. Il guérira dans l’amour et accomplira la charité. Il chassera le diable et éloignera toute crainte. Il vous ouvrira le Ciel et fera de vous un contemplatif. » Ainsi, le Nom est la nourriture et la protection de notre âme.
En Allemagne, Henri Suso (+ 1366) fit broder le Nom en sa forme abrégée. Il l’envoyait à ses fils spirituels pour qu’ils le portent comme un « sceau d’amour sur le cœur » (Ct 8,6) pour accéder à la « prière continuelle ». Il fut le premier à matérialiser ainsi l’objet de sa ferveur. Porter un tel signe peut nous y aider.
En Italie, Bernardin de Sienne (+ 1444) enseignait sur la beauté et les vertus du Nom. Il présentait à la foule une tablette sur laquelle il avait fait peindre « IHS » en lettres d’or, au centre d’un soleil à douze rayons qui symbolisent les apôtres. « De même que vous adorez Jésus dans sa chair, disait-il, de même vous devez adorer le nom de Jésus : non pas les lettres peintes, non pas le signe, mais Celui qu’il signifie. » Ainsi, son Nom EST sa Personne.
Deux développements notables de la dévotion sont l’établissement d’un culte liturgique, dont la Messe votive, l’Office et la Fête du Saint Nom, des Litanies, et le développement de Confréries.
Lorsqu’Ignace de Loyola (+ 1556) et ses compagnons décidèrent leur fondation, ils l’appelèrentSociété de Jésus afin de « procurer la plus grande gloire possible à ce nom adorable. » Ignace se plaisait à marquer ses lettres du trigramme IHS qu’il adopta comme sceau et qui devint l’emblème de la Compagnie. Ainsi, le Nom en hébreu, ou l’IHS, peut trôner en bonne place sur un bureau ou dans nos courriers.
L’époque contemporaine
Son emploi fréquent et simple signe l’affection personnelle, le contact direct ou l’appartenance, comme l’indique le Dictionnaire de Spiritualité.
Conclusion
Sans relâche, garde son Nom avec foi et amour. C’est la prière la plus simple et la plus intime. Demeure ainsi en Dieu car « Il est proche de celui qui L’invoque en vérité » (Ps 144,18).
De saint Bernard de Clairvaux « Il n’y a rien qui soit plus propre à arrêter l’impétuosité de la colère, à abaisser l’enflure de l’orgueil, à guérir les plaies de l’envie, à retenir les débordements de l’impureté, à éteindre le feu de la convoitise, à apaiser la soif de l’avarice, car lorsque je nomme Jésus, non seulement je me représente un homme doux et humble de cœur, bon, sobre, chaste, miséricordieux, et je me Le représente encore comme Dieu tout-puissant, qui me guérit par son exemple, et me fortifie par son secours. Voilà ce que me dit le nom de Jésus. Ô mon âme, tu as là un antidote excellent et salutaire, un remède efficace et souverain contre toutes tes maladies. Aie-le toujours dans ton sein, aie-le toujours sous la main, afin que toutes tes affections et toutes tes actions soient dirigées vers Jésus. » |
La citation
«Ô Jésus, ô Jésus Ne m’offrez rien de plus Que mon Jésus. Quand le soleil se lève, Qu’il n’y ait sur mes lèvres Que mon Jésus. Et lorsque je suis seul Je ne veux que Lui seul Je veux Jésus. Que m’importe le monde, Ses richesses sans nombre, Je veux Jésus. Et quand viendra la mort, Que mon chant soit encore, Donnez-moi Jésus » (Extrait d’un Negro spiritual)
Pour aller plus loin…Rien que pour aujourd’hui :Je peux pratiquer cet exercice conseillé par saint Paulin de Nole : « Quelqu’un est-il dans la tristesse ? Que le nom de Jésus vienne dans son cœur et passe de là dans sa bouche. Aussitôt, à la lumière de ce nom, tout nuage se dissipe et la sérénité revient. Quelqu’un tombe-t-il dans le péché ? S’en va-t-il à la mort en désespérant ? Qu’il invoque aussitôt ce nom de Vie, aussitôt il renaîtra à la vie. » Lectures
|
Retrouvez les articles précédents de notre série « Vie d’oraison ».
(publication éditée par des frères et sœurs de la Communauté des Béatitudes – ©droits réservés).