Claude Brenti a fondé les Éditions des Béatitudes en 1983 à Nouan-le-Fuzelier. En cette fin d’année, il part en retraite après près de 40 ans à la direction des EdB. Nous le remercions pour ce bel apostolat qu’il a poursuivi au long des années avec passion et cet unique désir : annoncer l’Évangile à travers les livres. ll a bien voulu répondre à quelques questions de Sr Marie de la Visitation.
Pourquoi avoir lancé une maison d’édition ? Quelle était ta motivation, ton but ? Quelle joie cela t’a-t-il apporté ?
Claude Brenti : Il y a 39 ans, en 1983, nous étions, ma femme et moi, au Maroc où nous avions fondé une maison de la Communauté des Béatitudes. Nos responsables nous ont appelés pour revenir en France, en Sologne, fonder un centre spirituel pour y organiser des retraites prêchées, et en même temps ils m’ont demandé d’organiser un apostolat de librairie pour toute la Communauté. Les gens à l’époque avaient parfois du mal à se procurer des livres de la spiritualité du Renouveau. Beaucoup avaient un besoin de formation et de nourriture spirituelle. L’idée était que dans chaque maison de la communauté il y ait une petite librairie. On a démarré comme ça et un an après, en 1984, j’ai proposé aux responsables de la communauté de nous lancer nous-mêmes dans l’édition. Nous avions des auteurs potentiels et ils avaient parfois du mal à trouver un éditeur. Et puis cela nous donnait une liberté éditoriale, et aussi un travail rémunérateur pour des membres de la Communauté. J’avais bien conscience qu’il y avait déjà pas mal d’éditeurs chrétiens. Mais le premier verset de l’évangile de Luc m’a convaincu. Il écrit : « Puisque beaucoup ont entrepris de composer un récit des événements accomplis parmi nous… il m’a paru bon à moi aussi, … d’en écrire un récit ordonné ». Luc ne s’est pas dit « il y a déjà plusieurs évangiles, inutile d’en écrire un autre ». Alors je me suis dit « certes il y a déjà des éditeurs, alors il me paraît bon que nous nous lancions dans ce projet, pour témoigner de ce que nous voyons et vivons, et si possible, par ce média qu’est le livre, atteindre des gens qui ne viendraient jamais dans nos maisons. Et c’est ce qui s’est passé.
Quels sont tes plus beaux souvenirs au sein des EdB ?
C.B : Notre premier livre fut un « Chemin de Croix », préfacé par André Louf, ancien père abbé du Mont des Cats. Un jour un homme, jeune agriculteur, nous a écrit qu’il avait perdu sa femme d’un cancer et que c’est la lecture de ce chemin de Croix qui lui avait permis de traverser cette épreuve. L’édition n’est pas comme la prédication de retraite où nous avons les gens devant nous et des témoignages à la fin. Nous avons peu de témoignages alors quand nous en recevons un de ce genre, cela donne sens à tout un travail en back-office ! Mais il y a eu des moments plus « glorieux », comme quand nous avons rempli l’église Saint-Sulpice en 2008 à Paris pour le lancement du livre « Viens Esprit créateur » du P. Raniero Cantalamessa. Lui-même est venu de Rome donner son témoignage. J’avais invité Raphaël Cornu-Thénard à venir témoigner en première partie. Ce fut une belle soirée de louange ! Les groupes de prière de Paris et plusieurs communautés se sont associées à l’événement. C’est un beau souvenir. L’Esprit Saint fait la communion ! Et nous avons vendu pas mal de livres à la sortie !
Avant de partir, pourrais-tu nous partager ta plus grande espérance pour le monde du livre et notamment celui du livre chrétien ?
C.B : Lors d’une retraite pour prêtres et diacres que je suivais, le prédicateur, un père carme me disait : « c’est la lecture du Pèlerin russe qui a fondé ma vocation ». Dans les débuts du Renouveau, combien de personnes ont été « converties » par la lecture de « La Croix et le poignard ». À un moment, j’avais rassemblé des témoignages de saints dont l’appel ou la vocation s’origine dans une lecture : saint François, Thérèse d’Avila, Augustin, … Un livre peut changer une vie, éclairer un discernement, orienter une vocation. Peut-être ce sera un livre audio, un livre numérique lu sur une tablette ? Peut-être ce sera un livre papier car ce support permet une relation toute particulière avec le lecteur. Combien de nos livres ont touché des cœurs, aidé des couples, des familles, des consacrés, permis à des gens de passer des caps difficiles ? On le saura peut-être au Ciel !
Charles de Foucauld a écrit à un ami : « En consacrant chaque jour un certain temps à la lecture, à des lectures bien choisies, vous ne tarderez certainement pas à être beaucoup plus contents de vous-même et à vous sentir affermi, encouragé, plus fort, plus paisible, plus plein de foi, d’espérance et de charité, plus heureux, heureux du bonheur intérieur que Dieu donne aux âmes de bonne volonté ».
C’est mon espérance, que les livres de littérature chrétienne touchent les cœurs, nourrissent la vie de foi et de prière de nos lecteurs, rejoignent les gens dans leur soif profonde et atteignent ceux qui s’interrogent sur le sens de leur vie.