« Donne de ton cœur, avec le sourire. » disait Sainte Mère Teresa. C’est inspiré par ces mots que notre frère Elie, membre laïc de la Communauté des Béatitudes au Liban, a créé avec des amis une application pour loger les soignants à proximité des hôpitaux…
Etant médecin mais n’étant pas sur la ligne de front, puisque je suis chirurgien orthopédiste, j’avais à cœur de témoigner d’un acte de solidarité avec ma communauté médicale. Le personnel soignant qui travaille toute la journée au contact des personnes infectées, soit retourne à son domicile chez ses parents, sa femme ou ses enfants et les met ainsi en danger ; soit dort dans les hôpitaux, les couloirs des services ou leur voiture. Cette pensée me tracassait et je n’arrivais pas à trouver une solution tout seul.
160 soignants logés à proximité des hôpitaux en deux semaines !
L’idée s’est concrétisée quand un de nos amis nous a proposé des appartements normalement destinés à être loués sur une plateforme en ligne… Un petit groupe s’est formé et en deux semaines, nous avons pu loger 160 personnes ; des médecins, des infirmières et des aides-soignants.
Le petit groupe, formé au départ de quatre personnes, s’est agrandi à huit personnes, tous activistes depuis la Révolution d’octobre 2019 à Beyrouth. Chacun de nous essaie de trouver des fonds, de répartir le personnel, de vérifier les logements offerts et de les nettoyer. Les choses commencent à s’organiser progressivement mais rapidement. « Baytna Baytak » ( en libanais, « notre maison est ta maison » ) est devenu connu dans la communauté médicale et sur les réseaux sociaux.
Les donateurs – en appartement ou en espèce/argent- et le personnel soignant, peuvent rejoindre notre page Facebook, télécharger en un click la demande en ligne et faire une demande de logement ou un don. Un site internet est aujourd’hui en cour de construction. Nous avons également été sollicités par des personnes de différents pays qui ont des initiatives similaires et nous essayons de coordonner avec eux.
Je resterai longtemps marqué par les larmes d’un infirmier au moment où il rentre dans sa chambre offerte par « Baytna Baytak », après une semaine passée à dormir dans sa voiture…
La solidarité qui jaillit de ce projet, la disponibilité de chacun et la gratuité du don donnent un sens à toute chose dans ces moments difficiles. Je resterais longtemps marqué par les larmes d’un infirmier au moment où il rentre dans sa chambre offerte par « Baytna Baytak », après une semaine passée à dormir dans sa voiture pour ne pas rentrer chez lui où loge également son amie qui a une insuffisance respiratoire et qui est donc à risque. Il m’est aussi difficile d’oublier le regard d’un médecin recevant un repas chaud dans sa chambre d’hôtel, alors que ça faisait une semaine qu’il n’avait plus eu de vrais repas.
Les difficultés sont également au rendez-vous !
La peur d’être infecté et l’insécurité des personnes qui habitent déjà dans ces immeubles, les transports en commun absents au Liban. Mais pour chaque difficulté, une solution arrive au bon moment là où l’on s’y attend le moins. Par exemple, une société de désinfection propose de nettoyer et désinfecter les appartements gratuitement avant et après chaque personnel soignant, une société de location de voiture nous donne des voitures gratuites pour les médecins et infirmières sans voiture.
Notre personnel soignant se donne jusqu’au bout, jusqu’à même se mettre en danger et quelque fois donner sa vie. Notre engagement est d’être à leur côté, de les soutenir et de leur donner chaque jour, un petit chez soi où ils peuvent se reposer et protéger les gens qu’ils aiment.
Dans l’ésperance, nous sommes déjà tournés vers l’après, avec dans notre cœur plein de projets pour soutenir les plus nécessiteux et leur trouver un foyer.
Témoignages
Betty T, 26 ans, travaille comme infirmière à l’Hôtel-Dieu de France, dans le service Covid-19. Elle s’est formée récemment et a intégré l’unité de pneumologie qui s’occupe des personnes atteintes de troubles respiratoires liés à l’infection virale. « Si nous renonçons à notre devoir, à qui laisserait-on les patients ? » s’interroge cette infirmière, affirmant qu’elle s’active autour d’eux durant de « longues journées de 12 heures ». Même si elle prend toutes les précautions nécessaires durant son travail, elle ne voudrait pas exposer sa mère et ses sœurs avec qui elle habite dans un appartement. Ayant eu connaissance de l’initiative, elle a contacté notre association et a pu déménager dans un bel appartement de Beyrouth.
Elie A, médecin dans le service de COVID-19 de l’hôpital gouvernemental de Beyrouth, dormait depuis plus d’une semaine à l’hôpital après son horaire de travail pour ne pas retourner chez lui, où son père malade est déjà dans un état critique. Il a pu être logé le soir même dans une chambre d’hôtel et reçoit une ration alimentaire chaude chaque jour. “ J’arrive maintenant à parler à mon père à travers les réseaux sociaux tranquillement sans avoir peur de le contaminer et je suis plus reposé pour mes longues journées de travail a l’hôpital. ’’
Chaque jour, nous rendons grâce pour la joie de donner, et ces témoignages nous donnent la force et la détermination de continuer de l’avant !
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